Le ministre de l’économie et des finances

même au bord du précipice du surendettement nous dit que tout va bien !

09 - Mars - 2018
Amadou Ba, ministre de l'économie et des finances du Sénégal
Amadou Ba, ministre de l'économie et des finances du Sénégal

« Qui paye ses dettes s’enrichit » dit-on ; on pourrait en déduire, qui s’endette, s’appauvrit ! Notre ministre de l’économie et des finances lui, au vu de l’euphorie à laquelle il nous annonce sa réussite de lever 1184 milliards de FCFA en Eurobonds, semble nous dire, qui s’endette s’enrichit !

Le ministre a parlé des avantages de ses Eurobonds sur le financement du PSE, eh bien moi je soulèverai le débat des inconvénients pour titiller un peu les économistes sénégalais et permettre aux Sénégalais de prendre conscience sur la politique d’endettement du gouvernement de Macky Sall et de ses conséquences sur notre futur dans les prochaines 30 ans à venir. Comprenez que ceux qui nous endettent aujourd’hui, ne seront plus là lorsqu’il faudra solder les comptes.

D’abord, notre ministre de l’économie et des finances se glorifie des taux 4.75% et 6.75% obtenus pour une maturité respectivement de 10 ans et de 30 ans, ce qu’il impute à de bonnes perspectives macroéconomiques du Sénégal. Ces taux en réalité restent trop élevés car même si comparaison n’est pas raison, le taux de financement à 10 ans des obligations américaines est de 2,23%, celui du Canada 1,88%, la Chine 1,48%, le Japon 0,057%, la France 0,79%, l'Allemagne 0,48%. Ces taux obtenus par notre ministre, rapportés à notre budget provoquent un service de la dette annuelle énorme, peut-être beaucoup plus élevé que le budget destiné à l’éducation nationale qui est à l’agonie faute de moyen. Il faut comprendre que presque tous les Etats riches ou pauvres peuvent lever des fonds, la différence est que plus un pays a des risques de défaillance de paiement, plus ses taux sont élevés. C’est la raison pour laquelle, le Venezuela a des taux autour de 30%, pourtant c’est un pays pétrolier, et le Sénégal qui compte sur son statut de futur état pétrolier, se pare-t-il du syndrome vénézuélien ?

Le ministre nous dit qu’il s’endette pour exécuter les projets d’infrastructures du PSE, mais lorsqu’on s’endette on doit avoir un bon plan pour pouvoir rembourser ses dettes, peut-on le faire avec les infrastructures lorsque l’on voit que ceux qui pourraient être rentables sont captés par des firmes étrangères. Pour pouvoir faire face à nos engagements, nous devrions pouvoir générer de la plus-value. Mais la structuration économique qui donne beaucoup plus de place aux entreprises étrangères au détriment de notre privé national, qui dépend du commerce extérieur pour ses ressources et dont la tension de l’assiette fiscale est au bord de la rupture, ne permet pas de générer assez de revenus propres pour payer nos dettes et prendre en charge convenablement la demande sociale. Il faudrait réorienter notre économie vers la production, sortir du modèle tout export de nos matières premières et tout import et ceci souvent porté par un secteur informel désorganisé et non soutenu par l’Etat.

Continuer à nous financer par l’extérieur ne permettrait jamais d’avoir cette indépendance que les jeunes générations réclament, et 68 ans après nos indépendances, nous devrions avoir un secteur bancaire avec une épargne locale nous permettant de nous autofinancer. Mais ceci signifie enrichir les Sénégalais en leur donnant du travail, enrichir le privé sénégalais et accompagner le secteur informel vers le formel et donner la priorité à nos entreprises privées dans le PSE pour que cette croissance de 7% qu’on nous vend pour 2018, soit consommée localement. Le schéma économique que le président Macky Sall est en train dérouler est organisé pour drainer les ressources (naturelles et financières) vers les pays étrangers qui nous endettent et viennent exécuter eux-mêmes ces infrastructures pour lesquelles on se met aux Eurobonds. Au 31/12/2017, l’endettement du Sénégal était à 5100 milliard de FCFA ce qui correspond à 60% de notre PIB et à 10 points de la limite de 70% fixée en zone CEDEAO. Si on y ajoute ces 1184 milliards on est à 6284 milliards ce qui va exploser bientôt cette limite et nous faire entrer dans le club des pays les plus endettés dans notre sous-région. Enfin, le ministre se félicite de la notation de Moody’s qui est passée de B1+ à BA3, alors que cette note signifie qualité moyenne inférieure c’est-à-dire, spéculatif ce qui ne devrait pousser à l’autosatisfaction. L’austérité du président Abdou pour rembourser les dettes du Sénégal est encore dans nos mémoires pour nous rappeler que ceux qui nous endettent sont en train de faire du fric sur notre dos, mais notre développement est le cadet de leurs soucis. Et Attention aux fonds vautour qui sont en embuscade !

Le ministre nous dit aussi qu’une partie de ces dettes va également servir à racheter certains crédits, notamment l’Eurobond de 2011 dans le cadre de la stratégie de gestion de la dette. Mais est-ce qu’on n’est pas en train de s’endetter pour payer des dettes ?

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