Jeudi dernier Macky Sall, a donc lancé le « dialogue national », avec cette question : l’a-t-il fait en tant que chef de l’État sénégalais ou potentiel candidat à un troisième mandat en février prochain ?
En réalité ces journées snobées par l’opposition, (où est le dialogue ?) ne sont qu’un écran de fumée pour dissiper sa mauvaise gestion, et de se refaire une virginité afin, de pouvoir se représenter aux présidentielles de 2024.
Sa candidature est d’autant plus probable, certaine même, que l’horizon vient de s’éclaircir « miraculeusement » avec le retrait de l’arène politique de son principal opposant, Ousmane Sonko, condamné par contumace à deux ans de prison ferme pour corruption de la jeunesse, ce qui le rend désormais inéligible.
J’ai toujours dit qu’il ne fallait pas instrumentaliser la justice, ayant trop de respect pour les magistrats et l’institution qu’ils représentent, et celle-ci dans ce procès n’a fait qu’appliquer les dispositions du code pénal. Je ne vois donc pas derrière ces poursuites et cette condamnation la main diabolique d’un Deus ex machina, locution latine pouvant être traduite par « Dieu sorti de la machine », nommé Macky Sall. En revanche force est de constater que depuis Karim Wade et Khalifa Sall, et aujourd’hui Ousmane Sonko, ses opposants se retrouvent tous au tapis par suite de de démêlées judiciaires. C’est sans doute une coïncidence, mais une coïncidence qui nourrit le soupçon.
Si on ajoute à cela qu’il transgresse lui-même son engagement à ne pas effectuer un 3ème mandat, on comprend que la communauté internationale s’émeuve d’une telle dérive dans un pays qui se flatte d’avoir instauré depuis son indépendance en 1960 une démocratie qui fait honneur au continent et qui est un exemple pour beaucoup de pays africains.
L’objectif premier de n’importe quel dirigeant politique au pouvoir est d’unir son peuple et non de le diviser, le fracturer. Or aujourd’hui à quoi assiste-t-on depuis quelques jours avec tristesse et colère ? A des affrontements très violents, sanglants, qui s’apparentent à des émeutes, entre des éléments d’une jeunesse désabusée, sans avenir, et les forces de sécurité. Bilan, déjà dix morts, des victimes qui viennent s’ajouter aux treize autres de 2021 pour les mêmes motifs. Quel chef d’État, attaché aux principes républicains, peut être satisfait d’un tel bilan ? Cet entêtement de Macky Sall à conserver le pouvoir a aujourd’hui un prix, celui du sang, qui plus est du sang versé par une partie de la jeunesse sénégalaise. Le but de la politique n’est-il pas de gérer le mieux possible les affaires de la cité, comme le préconisaient Platon et Aristote ? En aucun cas de remplir les cimetières des cadavres de ses opposants. Macky Sall pourrait un jour devoir rendre des comptes sur ces évènements tragiques pour lesquels, comme chef de l’État, il porte une part de responsabilité.
Aujourd’hui l’homme se retranche derrière des arguties juridiques pour légaliser sa candidature à un troisième mandat, mais il aura beau faire, légalité ou pas, il a perdu toute légitimité auprès du peuple sénégalais et les derniers évènements le confirment amplement. Jamais durant son histoire le Sénégal, réputé pacifique et accueillant, n’a connu un tel climat de guerre civile, alors s’il vous plaît, monsieur le Président, utilisez les quelques mois qui restent de votre actuel mandat pour apaiser le pays, et non susciter la haine, et redonner espoir à nos compatriotes, c’est le plus grand service que vous pouvez rendre à votre pays. Il est encore temps, mais c’est urgent.
Vous pourrez alors quitter la scène politique la tête haute !
Ibrahima Thiam
Président du mouvement « Un Autre Avenir »