« Le parrainage ne sauvera pas le président Macky Sall… »

selon Ibrahima Thiam

17 - Décembre - 2018

Par Khalil Kamara - senego.com

Président du mouvement « Autre Avenir », Ibrahima Thiam est candidat déclaré à la prochaine élection présidentielle de février 2019. Originaire de Kaolack, lui aussi, à l’instar de Ousmane Sonko, fait partie de cette nouvelle génération qui pense que l’actuel chef de l’Etat a montré ses limites car, « incapable de résoudre les difficultés quotidiennes de nos compatriotes… »

Il veut ainsi apporter une couche nouvelle qu’il explique dans un livre à paraître d’ici le mois de décembre, « Un nouveau souffle pour le Sénégal ». A travers une vingtaine de chapitres, il a voulu analyser la situation au Sénégal, mais aussi établir un diagnostic, un état des lieux en matière économique, sociale, dans les domaines de la santé, de l’enseignement et la formation, de la culture etc. Les cas Karim Wade et Khalifa Sall ont aussi été soulevé lors de cette entretien.

Parlez-nous un peu de vous. Qui est Ibrahima Thiam ?

Je suis né en 1965 à Kaolack, j’ai donc cinquante-trois ans. Mon enfance s’est déroulée au Sénégal que quitté pour me rendre en France afin de poursuivre mes études. Je suis titulaire d’un Deug de sociologie que j’ai obtenu à l’université de Nancy, d’un DUT de techniques de commercialisation auprès de L’université de Paris XII et d’une Maîtrise des sciences de gestion délivrée par l’université Paris Dauphine. Je ne suis donc pas un technocrate et ne suis pas passé par l’Ecole nationale d’administration.

Mon parcours professionnel s’apparente davantage à ce qu’on appelle la société civile et j’en suis fier car j’ai le sentiment de ne pas appartenir à la caste de la haute administration et de n’avoir pas été formaté dans un moule comme tant d’autres dirigeants politiques.

Quelle direction avez-vous prise au terme de vos études ?

J’ai débuté ma carrière professionnelle en tant que gestionnaire de patrimoine. En 1998, j’ai intégré comme Responsable du service budget de la Délégation Régionale Paris Ouest & Nord du CNRS (Centre National de Recherche Scientifique), un des plus grands instituts scientifiques de recherche dans le monde. Et en 2004, je suis devenu chargé de mission à l’INSERM qui est un des plus grands instituts de recherche médicale en Europe.

Peu après j’ai intégré l’Institut Fédératif de Recherche en qualité de responsable administratif et financier avant de rejoindre, en 2013 l’ICAN (Institute Cardiometabolism And Nutrition) où durant deux ans j’ai piloté la mise en place des plateformes scientifiques et cliniques. En 2015, j’ai à nouveau rejoint le centre de de recherche de Saint-Antoine de l’INSERM en qualité de secrétaire général.

Changer d’entreprise plusieurs fois permet d’évoluer dans sa vie professionnelle, d’accumuler des expériences, de s’enrichir au contact de nouvelles personnes et de milieux différents. Comme secrétaire général il me revient d’assumer la direction administrative et financière de l’établissement. Je suis aussi chargé de l’accompagnement, de la mise en œuvre et du suivi des projets scientifiques du centre de recherche.

On pourrait résumer mon rôle en disant que je dois organiser, planifier et coordonner les différents acteurs et à ce poste on attend de moi une connaissance approfondie de la réglementation juridique, administrative et financière relative aux établissements publics. Cela nécessite également des qualités managériales car la plus grande richesse de l’entreprise est, d’abord et avant tout, humaine. En clair, j’ai été confronté au quotidien à ce qui s’appelle « la bonne gouvernance », qui est tout autant indispensable au développement d’une entreprise qu’au bon fonctionnement d’un état.

Cette vie professionnelle en France, très prenante, vous a tenu éloigné du Sénégal, avez-vous pu néanmoins conserver une relation privilégiée avec le pays ?

J’ai un attachement viscéral avec mon pays et ma région d’origine et durant toutes ces années j’ai initié sur place diverses initiatives comme la création d’un incubateur de start-up (T4COM) et d’une exploitation agricole (SENAGRI). J’ai aussi contribué à l’équipement de douze bibliothèques à Kaolack avec la région Île-de-France, le conseil général du Val-de-Marne et la ville d’Alfortville.

J’ai également organisé des chantiers internationaux a travers des séjours de deux semaines à Kaolack avec des jeunes déshérités du département de Val-de-Marne, accompagné la scolarité pendant dix ans des jeunes enfants en décrochage scolaire et réalisé trois courts-métrages avec des collégiens en difficulté scolaire de l’école Henri Barbusse. Pour moi l’engagement associatif, ou citoyen, est quelque chose d’essentiel, très enrichissant, très formateur et je suis fier de l’avoir fait au service de mon pays.

Parallèlement à ces activités vous avez aussi milité dans le cadre politique en occupant même des responsabilités au sein de l’opposition sénégalaise en Europe ?

En effet, car être loin des yeux ne signifie pas être loin du cœur et le sort de mes compatriotes au Sénégal ne m’a jamais laissé indifférent. Je m’inquiète de la situation de précarité dans laquelle se trouve beaucoup d’entre eux, pour ne pas dire de misère. Je m’inquiète de la gabegie financière et de l’usage des fonds publics pour des projets qui ne participent pas suffisamment au développement économique du pays et au niveau de vie des Sénégalais.

Je suis scandalisé par le niveau de corruption atteint dans certains secteurs clés de notre économie alors que le Sénégal dispose de nombreux atouts pour en faire un modèle en Afrique. Même la démocratie, que l’on cite en exemple, subit des atteintes permanentes de la part d’un pouvoir autocratique, aujourd’hui à bout de souffle. La situation qui est faite à Karim Wade et à Kalifa Sall est de ce point de vue scandaleuse, en les empêchant de pouvoir se présenter aux élections de février prochain, et ce alors que l’ONU a contesté le bien fondé des poursuite entamées contre eux. Cela disqualifie le régime de Macky Sall, au niveau des instances internationales.

C’est pour toutes ces raisons que voici un an j’ai créé le mouvement «Autre Avenir » afin de proposer un New-Deal aux Sénégalais et de redonner un nouveau souffle au pays. Aujourd’hui ce mouvement est présent à Dakar et dans chacun des quatorze départements du pays à travers des permanences animées par de nombreux militants. Nous sommes également présents aux côtés de la Diaspora, en France, mais aussi en Belgique, en Espagne, en Angleterre, en Italie et aux États-Unis, etc. Pour populariser notre mouvement on peut aussi consulter notre site : www.autre-avenir.com, qui se veut un outil de communication interactif destiné aux médias, aux sympathisants, aux militants et à toute personne désireuse de nous suivre, voire d’adhérer à notre cause.

Qu’est-ce qui a motivé votre décision de vous présenter à l’élection présidentielle ?

Le désir d’offrir une alternative au pouvoir en place. D’être une voie de recours après un septennat de Maky Sall qui s’est montré incapable de résoudre les difficultés quotidiennes de nos compatriotes. Il faut qu’une nouvelle génération accède aux pouvoirs, non pas en faisant de belles promesses qui n’engagent que ceux qui les entendent, ni même en venant avec de magnifiques projets qui plusieurs années après seront toujours dans les cartons.

Ma démarche est différente et je l’explique dans un livre à paraître d’ici quelques jours « Un nouveau souffle pour le Sénégal ». A travers une vingtaine de chapitres je me suis efforcé d’analyser la situation au Sénégal, d’établir un diagnostic, un état des lieux en matière économique, sociale, dans les domaines de la santé, de l’enseignement et la formation, de la culture, de la justice, de la culture, de la pêche, du tourisme, de l’énergie, etc. Le but étant à partir de ce constat d’apporter les corrections nécessaires, mettre fin aux dysfonctionnements, aux inégalités criantes, faire que ce qui ne marche pas aujourd’hui fonctionne demain.

J’attends énormément des jeunes et des femmes pour remettre le Sénégal sur la voie du développement et de l’amélioration des conditions de vie de nos compatriotes. Nous disposons sur place de ressources naturelles importantes, y compris le pétrole, nous pouvons aussi compter sur une élite intellectuelle capable de bâtir des projets entrepreneuriaux innovants. L’exil ne doit pas être une solution pour des jeunes inquiets de leur avenir et je veux qu’ils puissent trouver sur place un travail et des conditions de vie décente. Pour cela il nous faut soutenir et amplifier la croissance qui seule peut créer des nouveaux emplois, soutenir les jeunes créateurs d’entreprise, leur donner une chance de réussir et d’être fiers d’eux-mêmes.

Les partis politiques traditionnels sénégalais sont épuisés, à court d’idées et de motivation. Essentiellement parce qu’ils sont dirigés par des caciques de la politique qui aspirent à obtenir des privilèges pour eux et à distribuer des avantages à leur entourage, à se servir de leur position, plutôt qu’à servir la nation. Ces mœurs sont d’un autre temps et sont condamnés par une grande partie de la population. Il est plus qu’urgent de procéder à un renouvellement des hommes et des idées, tel est le sens de ma candidature à l’élection présidentielle de février 2019. J’ajoute que je veux lui redonner ce qu’il m’a apporté en mettant au service du pays le fruit de mon expérience, de mes réflexions et de mon énergie. Le Sénégal à besoin de tourner une page et je l’invite à en écrire une nouvelle porteuse d’espoir et d’avenir.

Avez vous récolté le nombre de parrains requis?

Le mouvement « Autre Avenir » a comptabilisé à ce jour 47221 parrains. Le compte n’y est pas encore mais nous continuons sur le terrain pour combler notre retard. Contrairement aux autres formations politiques, nous ne versons pas dans la surenchère. Pour cela, je vous invite à voir les chiffres. APR déclare 3.000.000 de parrains, les Karimistes annoncent de 800.000 parrains, Bougane dit avoir plus de 700.000 parrains, Pasteef de Sonko a atteint son objectif de 1.000.000 de parrains, Grand Parti avec 100.000 parrains, les partisans de Khalifa Sall…

Nous pouvons estimer que les parrains dépasseront largement la population du Sénégal. Chercher l’erreur !

Selon vous, le parrainage est-il une avancée ou un recul démocratique?

Je crois que nous aurons la réponse au soir de la validation des candidatures. En revanche le parrainage ne sauvera pas le président Macky Sall. Les sénégalais veulent tourner la page en 2019 pour une nouvelle alternative politique.

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