Voici une semaine, les sénégalais étaient invités à voter à l’occasion d’élections locales, et comme toujours à entendre les uns et les autres tout le monde a gagné et personne n’a perdu. Près de 6 millions de sénégalais se sont déplacés dans les bureaux de vote, sur une population totale de 17 millions, ils avaient à choisir entre quelques 3200 listes dans plus de 500 mairies et plus de 40 départements.
Dans l’absolu, l’opposition au pouvoir en place n’a pas lieu de fanfaronner en dépit de quelques beaux succès électoraux acquis notamment à Dakar et à Ziguinchor, car les soutiens de Macky Sall restent largement majoritaires en termes de villes conquises, ou conservées dans leur giron.
Quant à la majorité au pouvoir, en inversant la formule, la perte de quelques bastions acquis jusque-là à sa cause doit l’inquiéter. Certains parlent même de déculottée pour Macky Sall.
Un premier élément saute aux yeux lorsqu’on décrypte les résultats sortis des urnes, la majorité au pouvoir a perdu les principales villes du pays qui totalisent plus de 60% de l’électorat et il est donc difficile aujourd’hui à Macky Sall de prétendre qu’il est majoritaire dans le pays.
Le deuxième élément objectif est qu’Ousmane Sonko, le leader du PASTEF sort renforcé de cette consultation électorale, et singulièrement en Casamance, après avoir remporté la ville de Ziguinchor. Pour autant il serait bien avisé de ne pas prendre la grosse tête car il y a loin de la coupe aux lèvres. Sa radicalité exaspère de plus en plus de nos compatriotes, or au Sénégal comme partout ailleurs tout candidat à la présidentielle se doit de rassembler et non de diviser, unir et non opposer.
Le troisième élément à considérer est la tendance politique qui se dessine à cinq mois des législatives, et à deux ans de la fin du second mandat de Macky Sall, alors que celui-ci entretient toujours un certain flou sur ses propres intentions. On peut constater au vu des résultats de dimanche dernier que la mainmise du pouvoir sur les collectivités locales s’est singulièrement érodée. Cela doit être interprétée comme un signal fort pour le président actuel, un clignotant orange.
Si d’aventure le « démon de midi » l’incitait à braver la volonté populaire, et les règles constitutionnelles en vigueur, en décidant de se représenter pour une « troisième » fois en 2024, les sénégalais par leur vote de dimanche lui ont exprimé leur défiance.
Macky Sall préside depuis le début du mois de janvier l’Union Africaine et comme ses collègues de la CEDEAO il a voté des sanctions à l’égard du Mali suite aux putschs successifs d’Assimi Goïta et de l’installation d’une junte militaire à Bamako depuis près de deux ans. Or la même CEDEAO a aussi, voici quelques temps, exprimé son hostilité au troisième mandat présidentiel et ce dans un souci d’alternance politique.
Pas sûr que Macky Sall serait bien inspiré de briser ce tabou, et en ce sens les récentes élections municipales sonnent pour lui comme un avertissement.
Fatoumata Cherif Dia
Vice-présidente du mouvement « Un Autre Avenir »