Depuis hier notre président est sur la route pour aller inaugurer une route par-ci, un pont par-là, en compagnie de toute la République, prenant des bains de foule au milieu des populations désœuvrées et gaspillant au passage nos maigres deniers publics dans du festif.
Au même moment, l’école publique est en grève et les enfants des plus pauvres parmi nous qui la fréquentent, risquent une année blanche car la stratégie du gouvernement dans la crise scolaire est le pourrissement de la situation. A la place d’entamer des négociations avec les enseignants, certains ministres de la République jettent l’opprobre sur tout le corps enseignant qui se décarcasse chaque jour pour faire leur travail dans des conditions très difficiles.
Il y a encore quelques jours les responsables de l’hôpital de Grand Yoff tiraient la sonnette d’alarme sur la situation critique dans laquelle cette structure se trouve. Et ceci n’est pas un cas isolé, c’est presque tout le secteur sanitaire du pays qui est au bord de l’asphyxie.
Les producteurs d’arachide qui ont une récolte record cette année peinent à écouler leurs graines et entendre dire que l’Etat du Sénégal décaisse 800 millions par jour pour racheter l’arachide peut être surprenant pour ces paysans au bord de la famine.
Pourtant, ces trois secteurs à savoir l’éducation, la santé et l’agriculture constituent le socle du développement économique de notre pays. « La bonne éducation de la jeunesse est le garant le plus sûr de la prospérité d'un État » disait Axel Axenstiem. La santé doit être au cœur de la lutte contre la pauvreté surtout dans notre pays, où les personnes les plus défavorisées accèdent plus difficilement aux soins et tombent plus souvent malades. Le modèle économique de notre agriculture reste dominé par l’arachide et des problèmes de récolte ou une faille dans sa commercialisation risque de faire effondrer tout le secteur.
Nous souhaiterions ainsi voir notre président de la République saisir son bâton de pèlerin et prendre le chemin de l’école pour aller rencontrer les enseignants et ces milliers d’étudiants non orientés ou exclus des universités privées faute du paiement de leur minerval. Le secteur de la santé moribond accueillerait volontiers le président de la République pour soigner ce grand corps malade, incapable de nous garantir des soins de qualité. Le monde rural scrute chaque jour le chemin pour apercevoir les mandataires de la SONACOS, les Chinois ou des acheteurs qui ne viendront pas cette fois-ci avec des bons impayés. Le chemin vers les agriculteurs du basin arachidier où se trouve d’ailleurs actuellement le président de la République, seraient grand ouvert pour lui, par ces producteurs inquiets de pouvoir écouler leur récolte.
Puisque nous aimons toujours prendre exemple sur la France, imaginez le président Macron faire le tour de la France pour aller inaugurer une route réparée de ses nids de poule à Marseille. Je vous rappelle que cette route entre Fatick et Kaolack existait bien avant notre indépendance et s’il y a autant d’inauguration sur cet axe depuis plus de 60 ans, c’est parce qu’il n’a jamais été bien fait. Nous ne disons pas que réparer des routes ou en faire de nouvelles, construire des ponts ou des édifices publics est mauvais, mais déplacer toute la République pour ça nous parait un peu exagéré. Si maintenant c’est pour faire la pré-campagne électorale, c’est anormal, car l’argent du contribuable sénégalais ne devrait pas être utilisé pour la promotion d’un candidat fût-il, le président de la République.
Dans notre laborieuse marche vers le développement, « vers l’émergence du PSE », le président de la République devrait se garder de répéter les mauvaises pratiques de beaucoup de dirigeants en Afrique consistant à du saupoudrage pour endormir les populations ignorantes ou impuissantes face à un appareil d’Etat déconnecté de la réalité, oppressif, pour in-fine devenir dictatorial.
Monsieur le président prenez le chemin vers votre peuple qui vous avait élu en 2012 et sur qui dépend entièrement votre réélection en 2019 et ne cheminez pas uniquement avec vos militants souvent de circonstance, qui partiront dès les premiers échecs, la preuve par les activistes qui étaient prompts à défendre Me Wade mais qui ont quitté le navire dès qu’il avait commencé à prendre eau et dont certains sont avec vous aujourd’hui.