On murmure avec insistance depuis quelques temps (plus précisément depuis les dernières élections législatives) que le gouvernement sénégalais envisagerait d’augmenter le montant de la caution exigée pour tout candidat déclaré aux prochaines élections présidentielles. Rappelons que celle-ci est actuellement de cinquante millions de francs CFA et l’idée serait de la porter à deux cents millions. Certains salueront cette intention la voyant comme une avancée démocratique de notre code électoral tandis que d’autres y verront là un piège orchestré par le pouvoir en place.
Et d’abord en quoi pourrait-il s’agir d’un progrès ? Les partisans de cette thèse argueront du fait que dans un pays qui compte autant de partis politiques que de jours dans l’année il est indispensable de placer la barre à un certain niveau si l’on veut éviter qu’une consultation aussi déterminante n’apparaisse comme une farce électorale. En 2012 déjà une dizaine d’hommes politiques avaient brigué le suffrage des sénégalais et sénégalaises. Qu’en sera-t-il en 2019 si une inflation de candidats surgissait ? A l’heure d’aujourd’hui nul ne peut le dire. Bien sûr parmi eux certains ne se feraient aucune illusion quant au résultat du scrutin trop conscients de ne pouvoir endosser le costume de chef d’Etat. Etre homme (femme) politique soit, responsable politique pourquoi pas, mais n’est pas qui veut « homme d’Etat », ou « femme d’Etat ». En revanche quelques-uns trouveraient sans doute avantageux de s’aligner sur la ligne de départ en espérant un retour sur investissement du fait de la publicité acquise lors de la campagne électorale. Au prix des spots publicitaires sur les écrans une telle opération « commerciale » pourrait en effet se révéler rentable. Freiner les ardeurs de ces marchands du temple en augmentant la mise de départ serait donc aux yeux de ses adeptes une bonne chose.
Pourrait-il s’agir d’un piège de la part des autorités en en place ? Cette hypothèse peut se défendre si l’on considère qu’il s’agit là d’une discrimination par l’argent. En clair seules les personnes fortunées, riches, pourraient prétendre se présenter aux présidentielles, et en premier lieu celles qui appartiennent depuis des années aux cercles du pouvoir. En revanche il serait hautement improbable, voire impossible, à des personnes de condition ordinaire de solliciter les suffrages de nos concitoyens. Où est la démocratie dans ces conditions et peut-on parler d’égalité de droits ? Si l’on ajoute en effet à une caution de deux cents millions le montant d’une campagne électorale le coût d’une candidature serait pour la plupart prohibitif. Et ne pourrait qu’inciter au détournement de fonds, à la corruption, comme cela s’est vu par le passé.
On voit bien qu’il y a là quelque chose d’anormal, d’injuste et qu’il est temps d’adopter une règle qui tout en permettant la candidature de personnes sérieuses éliminerait les candidats fantaisistes. Mais ce n’est pas à dix-huit mois de l’élection que l’on peut modifier les règles du jeu et une telle réforme devrait être mise en œuvre par le prochain président de la République dès son arrivée au pouvoir. En ce qui concerne notre mouvement UN AUTRE AVENIR nous ferons, le moment venu, des propositions dans ce sens.
Fatoumata Chérif Dia,
Vice-présidente d'Un Autre Avenir